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Condamnation du CHU de Nancy pour harcèlement moral

avocat fonction publique

CAA Nancy, 14 juin 2012, n°11NC01167 

avocat fonction publique

En ce qui concerne la responsabilité :
avocat fonction publique
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 : « Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel [...] » ;
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Considérant, d'une part, qu'il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
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Considérant, d'autre part, que pour être qualifiés de harcèlement moral, de tels agissements répétés doivent excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique ; que dès lors qu'elle n'excède pas ces limites, une simple diminution des attributions justifiée par l'intérêt du service, en raison d'une manière de servir inadéquate ou de difficultés relationnelles, n'est pas constitutive de harcèlement moral ;
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Considérant, enfin, que, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral ; qu'en revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui ; que le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé ;
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Considérant qu'à la suite de la nomination en 2007 du directeur des achats au centre hospitalier universitaire de Nancy et, un an plus tard, du responsable des secteurs achat médical et biomédical, le service technique biomédical a été réorganisé ; que M. Q., ingénieur biomédical en poste au centre hospitalier universitaire de Nancy depuis septembre 1986, a été ainsi rattaché à la direction des achats de matériels ; qu'il résulte de l'instruction qu'à partir de cette période M. Q., alors âgé de 60 ans, a vu ses notations et ses primes abaissées, il a été maintenu pendant plusieurs semaines seul dans les anciens locaux du service, son nom a été oublié de l'annuaire téléphonique interne à l'établissement hospitalier, un huissier de justice a été requis pour dresser un constat de l'état de rangement de son bureau, il a été invité à réaliser un bilan de compétences, des dossiers dont il avait la charge lui ont été retirés, un blâme lui a été infligé pour défaut d'exécution d'instructions relatives au respect des délais pour mener à bien les missions qui lui étaient confiées et pour absence de rangement de son bureau et, finalement, il a été licencié pour insuffisance professionnelle à compter du 21 octobre 2009 ; que, si le requérant n'a pas traité quatre dossiers d'achats, n'a pas honoré un rendez-vous avec un fournisseur et n'a pas respecté les délais d'exécution de certaines tâches, ses appréciations étaient globalement satisfaisantes jusqu'en 2007 et il donnait satisfaction aux médecins du centre hospitalier, à savoir les principaux « utilisateurs » de ses services ; qu'en outre, la décision de licenciement pour insuffisance professionnelle a été annulée par jugement du tribunal administratif de Nancy en date du 17 mai 2011, devenu définitif, au motif que cette mesure n'était pas fondée ; que M. Q., qui avait sollicité une mutation dans un autre poste, a alerté à plusieurs reprises la direction des ressources humaines ou le médecin du travail sur les pressions dont il estimait être victime ; que, suivi pour dépression nerveuse, le requérant a d'ailleurs été placé en congé de maladie puis de longue maladie avant de solliciter son départ à la retraite à la date d'effet du licenciement ultérieurement annulé ; que, dans ces conditions, le requérant doit être regardé comme victime d'agissements répétés ayant pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que, par suite, il est fondé à mettre en cause la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Nancy ;
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En ce qui concerne le préjudice :
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Considérant que si M. Q. soutient qu'il a subi un préjudice financier dans la mesure où il a été contraint de partir à la retraite en 2009 de façon anticipée, ce préjudice, au demeurant non justifié, ne présente pas un caractère certain ; qu'au surplus, il était loisible à l'intéressé d'attendre de connaître le sort réservé à sa requête dirigée contre la décision de licenciement pour insuffisance professionnelle avant de faire valoir ses droits à la retraite ;
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Considérant, en revanche, qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en allouant la somme de 6 000 € à M. Q. au titre de son préjudice moral ;
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Décide :
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Art 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy du 17 mai 2011 est annulé.
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Art. 2 : Le centre hospitalier universitaire de Nancy est condamné à verser à M. Q. la somme de 6 000 €. Cette somme sera assortie des intérêts légaux à compter du 6 août 2009. Les intérêts échus à la date 6 août 2010 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts.
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Art. 3 : Le centre hospitalier universitaire de Nancy versera à M. Q. une somme de 1 500 € au titre de l'article 1. 761-1 du code de justice administrative.


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MàJ 03/2013


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