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Légalité du traitement inégalitaire entre contractuels et fonctionnaires en matière de maladie
CE 4 mai 2016
avocat fonction publique
Vu la procédure suivante :
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Par une requête, enregistrée le 21 avril 2015 au secrétariat du
contentieux du Conseil d'Etat, Mme B...A...demande au Conseil d'Etat :
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1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet
résultant du silence gardé par le Premier ministre sur son recours gracieux tendant, d'une part, à l'abrogation de l'article 8 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de
l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale, en
ce qu'il subordonne le bénéfice du congé de grave maladie pour l'agent non titulaire en activité employé de manière continue à la condition d'avoir accompli au moins trois années de services et,
d'autre part, à la réparation du préjudice qui en est résulté ;
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2°) d'enjoindre au Premier ministre d'abroger la disposition
réglementaire litigieuse ;
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3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 108 447,88 euros en
réparation du préjudice qu'elle a subi ;
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4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000
euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier ;
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Vu :
- la directive n° 1999/70/CE du Conseil du 28 juin 1999
;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988
;
- le code de justice administrative ;
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Après avoir entendu en séance publique :
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- le rapport de Mme Angélique Delorme, maître des
requêtes,
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- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public
;
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1. Considérant qu'aux termes de l'article 8 du décret du 15 février
1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires
de la fonction publique territoriale : " L'agent non titulaire en activité employé de manière continue et comptant au moins trois années de services, atteint d'une affection dûment constatée, le
mettant dans l'impossibilité d'exercer son activité, nécessitant un traitement et des soins prolongés et présentant un caractère invalidant et de gravité confirmée bénéficie d'un congé de grave
maladie pendant une période maximale de trois ans (...) " ;
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2. Considérant que Mme A...a demandé au Premier ministre d'abroger
cette disposition, en tant qu'elle fait obligation à un agent non titulaire souhaitant bénéficier d'un congé de grave maladie d'avoir accompli au moins trois années de services, au motif que cette
condition porterait illégalement atteinte à l'égalité de traitement entre les agents non titulaires et les agents titulaires, ceux-ci n'ayant pas à justifier d'une telle durée de services pour
pouvoir prétendre à ce congé ; que Mme A... a également demandé réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de ce refus d'abrogation ; qu'elle a formé devant le Conseil d'Etat des
conclusions tendant à l'annulation du refus opposé à ces différentes demandes ;
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Sur les conclusions tendant à l'annulation du refus d'abrogation
:
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3. Considérant, d'une part, que la différence de traitement critiquée
par Mme A... est fondée, non pas sur la durée déterminée ou indéterminée de la relation de travail, mais sur le caractère statutaire ou contractuel de celle-ci ; que toutefois le principe de
non-discrimination mentionné à la clause n° 4 de l'accord-cadre figurant en annexe à la directive 1999/70/CE du Conseil du 28 juin 1999 sur le travail à durée déterminée a pour seule portée de
proscrire les différences de traitement opérées entre les travailleurs à durée déterminée et les travailleurs à durée indéterminée placés dans une situation comparable ; que, dès lors qu'au regard de
cette directive les agents titulaires régis par un statut et les non titulaires recrutés par contrat ne sont pas placés dans une situation comparable, Mme A...ne saurait utilement s'en prévaloir
;
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4. Considérant, d'autre part, que le principe d'égalité ne s'oppose pas
à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un
comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs
susceptibles de la justifier ; que la différence de traitement appliqué, en matière de congé de grave maladie, entre fonctionnaires territoriaux et agents non titulaires de la fonction publique
territoriale, est justifiée par la spécificité des conditions d'emploi de ces derniers ainsi que par le fait que ces deux catégories d'agents bénéficient de régimes de protection différents ; qu'elle
est ainsi en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit ; qu'elle n'est pas manifestement disproportionnée au regard des motifs qui la justifient ; que, par suite, en refusant d'abroger
une telle mesure réglementaire adaptant le droit au congé de grave maladie à la situation particulière des agents non titulaires de la fonction publique territoriale, le Premier ministre n'a pas
porté illégalement atteinte au principe d'égalité de traitement entre les agents publics, qu'ils soient titulaires ou non titulaires ;
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5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas
fondée à demander l'annulation de la décision portant refus d'abrogation qu'elle attaque ;
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Sur les autres conclusions de la requête
:
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6. Considérant que la présente décision, en tant qu'elle rejette les
conclusions dirigées par Mme A...contre le refus d'abrogation qui lui a été opposé, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions à fin d'injonction présentées par l'intéressée
ne peuvent elles-mêmes qu'être rejetées ; qu'en tout état de cause et sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité, les conclusions indemnitaires formées par Mme A...doivent également être
rejetées ; qu'enfin, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par Mme A...soit mise à la charge de l'Etat, qui
n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;
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D E C I D E :
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Article 1er : La requête de Mme A...est
rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme B...A..., au
Premier ministre et au ministre de l'intérieur.