Avocat Droit du Travail - portail d'information sur le droit du travail
Une demande d'explication peut être une sanction disciplinaire
avocat droit du travail
Soc., 30 janv. 2013, n° 11-23.891, FS-P, SA société L c/ M. C. : JurisData n° 2013-001079
avocat droit du travail
LA COUR – (...)
avocat droit du travail
• Attendu, selon l'arrêt attaqué, que dans le cadre du préavis déposé par le syndicat Sud PTT 13 le 25 avril 2007, M. C., employé en qualité de facteur au centre courrier de Marseille, a, le 3 mai 2007, pris son service avec cinquante cinq minutes de retard, soit après les opérations de « tri général » ordinairement dévolues aux facteurs jusqu'à 7 heures 25, avant que ceux-ci ne préparent leur propre tournée (« tri facteur »), celle-ci débutant à 9 heures 30 ; qu'à son arrivée, il lui a été demandé d'effectuer trente quatre minutes de « tri général », correspondant à une durée proportionnelle au temps consacré à cette activité au cours d'une journée normalement travaillée (soit quarante minutes), ce qu'il a refusé de faire ; que deux demandes écrites d'explications lui ont été remises, relatives l'une à son refus de prendre son service à l'heure prévue par le règlement intérieur et l'autre à celui d'accomplir les tâches du tri général ; qu'à l'issue de sa tournée, il a refusé de signer une feuille d'émargement, ce qui a donné lieu à une troisième demande écrite d'explications ; que les deux jours suivants, le salarié a continué à exercer ses fonctions dans des conditions identiques à celles du 3 mai précédent, toujours dans le cadre du préavis de grève ; que l'employeur lui a, de nouveau, demandé d'effectuer trente quatre minutes de tri général et de signer une feuille d'émargement à l'issue de sa tournée, ce qu'il a refusé de faire ; que le 30 mai 2007, l'employeur lui a notifié un avertissement pour refus d'obéissance ; que contestant cette sanction, M. C. a, le 4 octobre 2007, saisi la juridiction prud'homale ;
avocat droit du travail
Sur le premier moyen :
avocat droit du travail
• Attendu que L fait grief à l'arrêt de dire que les faits du 3 mai 2007 ont fait l'objet d'une double sanction, alors, selon le moyen :
avocat droit du travail
1°/ que l'engagement par l'employeur d'une procédure contradictoire en vue du prononcé d'une éventuelle sanction ne constitue pas en lui-même une sanction ; que tel est le cas d'une simple demande d'explications, mesure d'instruction qui, sans affecter la présence du salarié dans l'entreprise, sa carrière ou sa rémunération, a uniquement pour objet de lui permettre d'expliquer et de justifier auprès de l'employeur les raisons de son comportement préalablement à toute décision disciplinaire, peu important que cette mesure d'instruction soit ou non conservée au dossier du salarié ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 1331-1 du Code du travail ;
avocat droit du travail
2°/ que l'aveu judiciaire ne peut pas porter sur un point de droit ; qu'en retenant à l'appui de sa décision que L aurait « ... implicitement reconnu devant une autre juridiction que les demandes d'explications écrites dont M. C. a fait l'objet le 3 mai 2007 doivent être considérées comme des sanctions », la cour d'appel a violé l'article 1354 du Code civil ;
avocat droit du travail
• Mais attendu que, selon l'article L. 1331-1 du Code du travail, constitue une sanction disciplinaire toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié qu'il considère comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération ;
avocat droit du travail
• Et attendu qu'ayant constaté, par motifs adoptés, que la procédure de demande d'explications écrites en vigueur au sein de L, avait été mise en oeuvre à la suite de faits qualifiés de refus d'obéissance et que les demandes formulées par l'employeur et les réponses écrites du salarié étaient conservées dans le dossier individuel de celui-ci, la cour d'appel a pu en déduire que cette mesure constituait une sanction ; que le moyen, qui dans sa seconde branche critique un motif surabondant, n'est pas fondé pour le surplus ;
avocat droit du travail
Sur le deuxième moyen :
avocat droit du travail
• Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'annuler l'avertissement délivré le 30 mai 2007 pour les faits commis les 4 et 5 mai 2007 alors selon le moyen, que l'employeur est en droit, dans l'exercice de son pouvoir de direction, de réorganiser la journée de travail d'un salarié partiellement réduite par l'exercice de son droit de grève en lui demandant d'accomplir, pendant le temps de travail restant, les tâches relevant de ses attributions qu'il juge prioritaires pour assurer la continuité du service public auquel participe son activité ; qu'en retenant, au contraire, l'illégalité de l'avertissement délivré à M. C. pour refus d'obéissance, motif pris de ce que la tâche de tri général d'une durée de trente quatre minutes qu'il avait refusé d'accomplir sur son temps de travail était celle qu'il aurait dû normalement accomplir pendant le temps de grève, de sorte que cet ordre, ayant pour objet de pallier les effets de la grève, était constitutif d'une entrave, la cour d'appel a violé l'article L. 2511-1 du Code du travail, ensemble le principe fondamental de la liberté d'entreprendre ;
avocat droit du travail
• Mais attendu qu'appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a, par motifs adoptés, retenu que l'avertissement avait été délivré au salarié en raison de sa participation au mouvement de grève que l'employeur jugeait illicite ; qu'elle a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;
avocat droit du travail
Mais sur le troisième moyen :
avocat droit du travail
Vu l'article 1147 du Code civil ;
avocat droit du travail
• Attendu que pour condamner l'employeur à payer une somme à titre de dommages-intérêts pour discrimination en raison de sa participation à un mouvement de grève, l'arrêt retient, par motifs adoptés, qu'une telle attitude, de nature à décourager les salariés de faire valoir leurs droits, constitue une faute qu'il convient de sanctionner ;
avocat droit du travail
• Qu'en statuant ainsi, sans caractériser, de la part de l'employeur, un comportement fautif distinct de celui ayant justifié sa condamnation à des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par le salarié du fait de l'avertissement annulé, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
avocat droit du travail
Et sur le quatrième moyen :
avocat droit du travail
Vu l'article 32-1 du Code de procédure civile ;
avocat droit du travail
• Attendu que pour condamner L, défendeur en première instance, au paiement d'une amende civile, l'arrêt retient, par motifs adoptés, qu'en développant des arguments contradictoires et en tentant de faire porter le débat sur l'illégitimité de la grève, que le conseil de prud'hommes n'a pas la compétence de trancher, L a développé des moyens de défense manifestement dilatoires et qu'il y a lieu de stigmatiser cette attitude ;
avocat droit du travail
• Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser un abus du droit de défendre en justice, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
avocat droit du travail
Par ces motifs :
avocat droit du travail
• Casse et annule, mais seulement en ce qu'il a condamné L à payer à M. C. une somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour discrimination en raison de la participation à un mouvement de grève et à une amende civile de 1 500 euros (...)
avocat droit du travail